L’implantologie est aujourd’hui une solution thérapeutique qui ne peut plus être ignorée. Remplacer l’organe dentaire dans sa globalité, sans devoir mutiler à court, moyen ou long terme les dents voisines, a toujours été la solution dite “idéale” pour tout praticien. La technologie mise à disposition grâce à la coopération entre industriels et cliniciens a permis de proposer aujourd’hui des traitements fiables à long terme, tout en réduisant les temps de traitements.

D’après les dernières études en France de l’Institut National de la Statistique (INSEE), on peut constater que le nombre de praticiens par habitant n’a pas augmenté depuis vingt ans. Les statisticiens pensent qu’avec le départ en retraite massif des “Papy Boomers”, ce ratio risque encore de diminuer. Cependant, la classe d’âge des actifs (20-65 ans) qui présente la plus forte demande implantaire a beaucoup augmenté depuis de nombreuses années. D’après l’organisme d’audit “Millénium”, 30 millions de français souffrent au moins d’un édentement unitaire.

La demande des patients est donc aujourd’hui de plus en plus forte. Les différents médias communiquent régulièrement sur ces techniques de soins et en font souvent l’éloge. Pourtant, d’après le rapport annuel Nobel Biocare publié en 2003, il semble que le pourcentage de praticiens qui posent des implants est relativement faible (inférieur à 25%) dans de nombreux pays. “ Millénium ” indique qu’en Europe seulement 10% des praticiens posent des implants.

Quelle est la réalité clinique aujourd’hui en France ? Il est facile de constater qu’un omnipraticien reçoit environ 15 à 20 patients par semaine qui peuvent faire l’objet d’un traitement implantaire. Quel que soit le type d’édentement, chaque praticien doit prendre en compte l’implantologie dans l’établissement du plan de traitement et se doit d’informer son patient en conséquence. L’implantologie est conforme aux connaissances médicales avérées.

À ce titre, cette thérapeutique s’inscrit dans l’obligation médico-légale d’information de chaque praticien envers son patient.

Pour faire face à la demande implantaire, les nouvelles générations devront pouvoir intégrer l’implantologie dans leur pratique quotidienne. Seul un praticien formé aux techniques implantaires sait donner l’information loyale, claire et intelligible telle qu’elle est définie dans le code civil.

Mais comment un praticien peut-il à ce jour en France avoir accès à une formation de qualité lui permettant de pratiquer l’implantologie en toute sécurité ? Existe-il une voie unique ? Que penser des séminaires organisés par les industriels ? Comment adapter son cabinet à l’implantologie ?

Quels implants choisir pour débuter ? Voici autant de questions que se pose chaque débutant, pour lesquelles nous allons tenter d’apporter des réponses.

Le seul pré requis nécessaire actuellement en France à la pratique de l’implantologie est de détenir le “diplôme d’Etat de Docteur en Chirurgie Dentaire”, acquis sur le territoire français ou son équivalent européen. Une fois diplômé, tout praticien inscrit au tableau de l’Ordre des chirurgiens-dentistes est autorisé à poser des implants dentaires chez ses patients.

Cependant, une assurance en responsabilité civile avec option spécifique à l’implantologie doit être souscrite par le praticien.

Avec un recul de plus de trente ans, il est naturel que l’implantologie soit aujourd’hui enseignée lors des études universitaires. Depuis une dizaine d’années, les universités ont voulu intégrer en fin de cursus (5ème et 6ème années) un programme sur les bases fondamentales théoriques de l’implantologie. Ce programme aborde l’historique de l’implantologie, les principes biologiques de l’ostéointégration et de la physiologie osseuse ainsi que les différents examens cliniques et radiologiques nécessaires à l’établissement du plan de traitement.

Une partie spécifique est également réservée à l’approche des grands systèmes mis actuellement sur le marché. Parallèlement à ces bases théoriques, les étudiants doivent pouvoir poser sur des modèles “fantômes” deux à trois implants. Certains peuvent au cours des séances cliniques, avoir à réaliser des prothèses supra-implantaires. Cette formation, bien qu’assez complète, n’est certainement pas suffisante pour débuter en implantologie.

C’est pourquoi de nombreuses universités ont intégré un cycle post-universitaire sous forme de “Diplôme Universitaire”, permettant de former des chirurgiens-dentistes confirmés en omnipratique et en chirurgie, aux techniques implantaires.

Vue-clinique-pré-opératoire

Vue clinique pré-opératoire. Suite à une infection chronique, la 23 a été avulsée quatre mois auparavant. Préparation à partir d’un wax-up d’étude d’un guide chirurgical afin d’optimiser la position finale de l’implant. Essayage du guide chirurgical en bouche et préforage transmuqueux avant ouverture des lambeaux.

L’enseignement par Diplôme Universitaire

Cette filière est actuellement la seule formation diplômante reconnue qui offre l’accès à un contenu théorique poussé et à une pratique clinique à la fois chirurgicale et prothétique.

Classiquement, elle est dispensée sur une période de trois années. La première est uniquement théorique et correspond à “l’attestation universitaire en implantologie” (A.U.I). Elle couvre un vaste programme axé sur les bases fondamentales. Cette année, divisée en cinq cycles, est sanctionnée par un examen permettant, selon son rang de classement final, d’accéder aux deux années pratiques du diplôme.

Parallèlement à cette A.U.I., quelques places sont réservées aux internes en odontologie voulant rentrer dans la filière chirurgicale.

La première année pratique est destinée à l’élaboration des plans de traitement implantaires, à l’iconographie et à la mise en place chirurgicale des implants. La seconde année est quant à elle consacrée à la mise en charge prothétique des implants posés en première année et aux techniques plus complexes telles que greffes osseuses et sinus lifts.

Au cours de ces deux années, chaque étudiant est amené à traiter environ une dizaine de patients avec des classes d’édentement différents.

Chacune de ces deux années est sanctionnée par un examen écrit. La partie orale de l’examen est, quant à elle, validée par la soutenance d’un mémoire. Le mémoire de première année est plutôt orienté vers un sujet chirurgical, le mémoire de deuxième année plutôt prothétique.

Cette voie de formation semble la plus équilibrée et la plus complète pour débuter en implantologie. Il faut cependant signaler qu’à l’heure actuelle, de nombreux Diplômes Universitaires ne font l’objet que d’une année de formation à la fois théorique et pratique. La valeur reconnue par le conseil de l’Ordre ne diffère pas actuellement selon la durée de formation. Chaque évaluation est propre à l’université qui dispense l’enseignement.

Cette formation présente l’avantage de traiter ses premiers cas avec l’aide de praticiens plus expérimentés. Elle permet de gagner en confiance et à tout moment de rectifier d’éventuelles maladresses. Malheureusement, comme nous venons de le voir, cette voie de formation n’est pas accessible à tous puisque le nombre de place reste très limité (de 3 à 10 place selon le D.U.) chaque année et elle est dispensée uniquement dans les villes universitaires. Quelles sont alors les autres possibilités d’apprentissage ?

Quel que soit le lieu d’exercice, tout omnipraticien peut trouver un confrère qui pratique l’implantologie. Il est d’ailleurs bien souvent le correspondant à qui l’on peut adresser ses patients pour la phase chirurgicale. De nombreux correspondants chirurgiens seront à même de vous initier à l’implantologie. C’est ce que l’on peut appeler “le compagnonnage”.

Vérification-per-opératoire

Vérification préopératoire de la concordance entre l’indicateur de direction et le guide chirurgical. Vue clinique per-opératoire de l’implant SERF EVL-N® de diamètre 4 mm, laissant apparaître un axe parfaitement intégré dans le couloir prothétique. Radiographie post-opératoire de l’implant posé selon l’axe prothétique idéal déterminé par le wap-up d’étude.

Le compagnonnage

Il se déroule habituellement en trois phases. Le correspondant dit “praticien formateur” (P. F) aide dans les premiers stades le “praticien en formation” (P.E.F) à établir les plans de traitement faisant appel aux techniques implantaires et oriente le P.E.F. sur le choix des formations théoriques mises à disposition des praticiens. Il peut également donner la littérature nécessaire à la formation théorique. Lors de la seconde étape du compagnonnage, le P.E.F participe activement aux chirurgies et le P.F demande généralement de l’assister au fauteuil.

La troisième étape consiste à échanger les rôles et cette fois, le praticien formateur va pouvoir guider le praticien en formation.

Ces trois étapes pourront se renouveler dès que ce dernier souhaitera franchir des difficultés dans les techniques chirurgicales. Si l’application du compagnonnage est aisée dans un cabinet de groupe, elle l’est beaucoup moins lorsqu’un praticien est seul dans son cabinet libéral. Le compagnonnage devra, selon nous, être généralisé dans les années à venir pour faire face à la demande implantaire. Il s’inscrit dans la ligne de conduite des diplômes universitaires qui sont finalement basés sur le même esprit de transmission des connaissances.

Le “praticien formateur” pourra guider le compagnon à chaque étape pour lui apporter la rigueur nécessaire. Après une analyse clinique, radiographique et pré-prothétique (modèles d’études, wax-up), le débutant pourra faire réaliser par le prothésiste, si nécessaire, un guide radiologique permettant de valider la concordance entre le futur axe implantaire et le volume osseux présent. Ce guide pourra être transformé alors en guide chirurgical permettant de s’assurer à chaque étape de la mise en place chirurgicale des implants que l’axe est bien conforme à l’axe idéal déterminé par le wax-up. Cette rigueur doit guider chaque praticien à tout moment et elle est le gage d’une implantologie de qualité.

Un entraînement chirurgical personnel au quotidien doit faire également partie de la formation en implantologie. Il n’est pas concevable de vouloir pratiquer l’implantologie sans être parfaitement familiarisé avec les différentes techniques chirurgicales issues de la parodontologie et de la chirurgie dentaire en général.

Même si, avec une méthodologie parfaite, un certain nombre d’écueils sont évités, les réactions tissulaires ne sont pas toujours celles auxquelles on s’attend. Il faut alors pouvoir gérer au mieux la situation clinique et apporter les soins nécessaires au problème présent.

De nombreuses associations ou sociétés scientifiques proposent des cours pour compléter nos connaissances. La méthodologie de traitement diffère selon les praticiens et selon les conférenciers.

Il est certain que chaque approche thérapeutique apporte un point de vue différent sur l’implantologie d’aujourd’hui. Participer aux différentes manifestations qui s’offrent à nous permet de progresser et de se faire sa propre opinion sur la marche à suivre dans les traitements implantaires. Certains industriels proposent des formations aux praticiens qui souhaitent débuter en implantologie.

Ces formations ont principalement un but commercial et peuvent parfois détourner le praticien de la rigueur nécessaire à un débutant.

Elles ne sont cependant pas à ignorer car elles permettent également de s’ouvrir à de nouveaux systèmes offrant des solutions prothétiques ingénieuses.

Débuter l’implantologie dans son cabinet implique des aménagements spécifiques à ce type de chirurgie. Non seulement investir dans un équipement dédié à la discipline (trousse implantaire, moteur de chirurgie, champs opératoires…) s’avère indispensable, mais il faut parfois procéder à un aménagement des locaux afin d’assurer un niveau d’asepsie maximum. En effet, une salle de soins dédiée à la chirurgie serait idéale pour la pratique de l’implantologie. L’implantologiste débutant doit faire face également au choix d’un système implantaire. Plusieurs études ont montré qu’aujourd’hui, il n’existe pas de différence significative du point de vue clinique à cinq ans entre les grands systèmes implantaires.

Le taux de survie des implants à cinq ans est de l’ordre de 98 % quel que soit le système utilisé. Il faut bien admettre que le choix du système implantaire est souvent directement conditionné par celui qu’utilise le praticien correspondant qui nous a donné la formation.

Il faut probablement rechercher un système ayant un bon recul clinique avec si possible des publications attestant de son efficacité à long terme. La mise en œuvre chirurgicale et prothétique doit être simple. Enfin, un large choix dans les techniques de mise en charge prothétique est un atout considérable dans le choix du système.

En conclusion, seule une pratique rigoureuse avec des connaissances théoriques solides peut assurer une sérénité dans l’apprentissage de l’implantologie. L’appui de confrères plus expérimentés reste primordial. Une formation diplômante peut bien évidemment être considéré comme la filière de choix.